Prochaine à droite

Un jour sans fin

Debout les campeurs et haut les cœurs, n’oubliez pas vos bottes parce que ça caille aujourd’hui. Ça caille dans le désert.
15 jours. 100km par jour. Je vous épargne la calculette ça fait 1500km de vélo pour traverser le désert du Taklamakan, littéralement « dont on ne revient jamais ». De quoi rivaliser avec le festival de la marmotte.

Mais revenons à Osh, le samedi 10 octobre où l’on rentre tout juste de vacances.

Ombre kirghize
Deux avions et une escale rattrapent les dix mois de pédalage. Quelques jours pour recaler notre horloge interne, récupérer les vélos, les remettre en état et les customiser, faire des courses et se faire déposer à Sary-Tash. Souvenez-vous, je vous en ai déjà parlé comme le dirait l’ami Jean-Claude. Petite bourgade aux confins du Kirghizistan, croisement des chemins pour aller notamment en Chine.

On reprend la route comme si on ne l’avait jamais quittée le mercredi 14 octobre au matin. On attaque directement par une montée, un col à 3600 mètres qui nous rappelle que finalement, on a bien quitté la route pendant plus d’un mois, et que le vin et le fromage n’aident pas à lutter contre l’altitude et ne servent aucunement d’entrainement.

L'Empire du Milieu
Le lendemain est un grand jour : on traverse la frontière et on entre enfin en Chine. Plus précisément on traverse deux postes frontières chinois. Le premier où on nous confisque les passeports, et le deuxième après 150 km de taxi obligatoire au milieu de montagnes magnifiques, pour récupérer les passeports et entrer officiellement dans l’Empire du Milieu. Au passage on prend 3h de plus. La Chine n’a qu’un fuseau horaire, et c’est celui de Pékin. Encore un jour de vélo et on arrive dans la ville de Kashgar, dans la province du Xinjiang, province autonome Ouïgour. Même si on devine qu’on est désormais en Chine, on est plutôt sur les bords du Milieu, et donc plus proche des pays d’Asie Centrale, à commencer par la langue parlée par les Ouïgours.

Négociation entre chapeaux
Dès le premier soir on se doit de découvrir les merveilles et curiosités de ce nouveau pays et ça passe par la nourriture évidemment. Au marché nocturne, on retrouve les traditionnels plats des pays en Stan, mais aussi plein de nouvelles saveurs, ce qui nous change du mouton. Par contre difficile de savoir ce qu’on mange. Surement du mouton. Tête, poumon, foie, intestins, langues, testicules, tout y passe. Pas dans nos assiettes, on reste soft. Un bout de poumon, quelques abats et ensuite ce sera des nouilles pour faire passer le goût. En dessert on trouve de délicieux beignets sucrés. Délicieux jusqu’à ce qu’on découvre, fourrés à l’intérieur, des rognons.
En attendant de se décider pour la suite de la route on découvre la ville de Kashgar et sa mosquée, et on passe du temps avec d’autres cyclistes. On visite aussi le marché aux animaux du dimanche, où des centaines de vaches, moutons, chevaux, ânes, yaks et chameaux sont vendus et achetés.

Brumeux
Debout les campeurs et haut les cœurs, n’oubliez pas vos bottes parce que ça caille aujourd’hui.

Le mardi 20 octobre on se décide enfin à partir. Ce sera à vélo, dans le désert du Taklamakan. Enfin par la route qui longe le sud du désert pour être plus précis celle qu’emprunta Marco Polo. Difficile d’avoir des informations sur cette option et les possibilités de ravitaillement. On verra bien. En tout cas ça semble prometteur : sur notre gauche le désert et ses dunes, sur notre droite la cordillère du Kunlun avec des sommets impressionnants dont le mythique K2 à moins de 200 kilomètres, et quelques villes oasis le long de ces 1500 kilomètres.

Rencontre
Debout les campeurs et haut les cœurs, n’oubliez pas vos bottes parce que ça caille aujourd’hui.

Malheureusement, une brume constante bouche la vue. Donc sur notre gauche, pas grand chose, sur notre droite, pas plus. Et encore, c’est quand on ne longe pas ces villes oasis qui s’étalent parfois sur 50 kilomètres. De nombreux arbres sont plantés afin de repousser le désert et cultiver des terres hostiles. Au milieu de champs de coton, ou en devenir, alors qu’au loin les dunes se dessinent, on pédale bercés par des hauts parleurs qui diffusent on ne sait quoi en chinois aux centaines d’Ouïgours qui travaillent la terre. Heureusement, au cours de ces 15 jours assez monotones, on se retrouve également à rouler pendant 300 km au milieu du désert, chargé de plusieurs jours d’eau et quelques kilos de nourriture. Parfois du sable, parfois des herbes basses, quelques chameaux de Bactriane probablement ; on ne se lasse pas vraiment. On a même la chance d’avoir un ou deux jours sans cette brume épaisse et on devine au loin les montagnes, récompense après une semaine de vélo.

Enfin les voilà
Debout les campeurs et haut les cœurs, n’oubliez pas vos bottes parce que ça caille aujourd’hui.

Autre élément à prendre en compte sur cette route de la soie, le vent. Entre légère brise et tempête de sable qui nous aveugle, notre vitesse passe de 30km/h à 10km/h selon l’orientation. Logique, il est plus souvent de face, même quand on tourne. Le moral suit la même courbe.
Le jour sans fin est aussi agréablement transformé par quelques évènements. On nous offre des fruits, des gâteaux, des choses avec du mouton dedans. Un policier vient effacer nos photos de militaires en patrouille au milieu d’un bazar. Les zips de la tente nous lâchent les uns après les autres. On fête nos un an de voyage au milieu des dunes. Bref, on ne s’ennuie pas entre deux journées monotones.

Dunes
Debout les campeurs et haut les cœurs, n’oubliez pas vos bottes parce que ça caille aujourd’hui.

On arrive enfin le mercredi 04 novembre à Ruoqiang. La route continue désormais à travers les montagnes, dans la province de Qinghai, habitée en partie par des tibétains. On en rêve mais les dernières nuits sous la tente, alors que nous sommes à peine à 1000 mètres d’altitude dans ce désert, sont fraiches. Le gel sur nos sacs de couchage le matin confirme ce que l’eau des gourdes laissait deviner : il fait déjà bien en dessous de zéro. L’hiver à 4000 mètres ne nous motive pas tant que ça. Il est l’heure de rejoindre le sud de la Chine.

Au programme des prochains jours : 50 h de bus pour rejoindre Chengdu où des amis se sont installés pour un an. Des amis cyclistes que vous connaissez bien. Souvenez-vous, je vous en ai déjà parlé…

Galerie photos

18 Comments

  • Désert, désert…. C’est presque aussi envoûtant que le ballet des vagues océanes. Vos photos m’époustouflent à chaque fois. C’est un peu surréaliste de vous savoir en Chine, d’admirer vos photos alors qu’il y a 8 semaines on rigolait tous les quatre autour de la table. 😁. 50h de bus seront vite oubliées quand vous verez vos amis.
    Je continue le Livre des Merveilles et vous suivez ses pas…. A sacré Marco ! Des millions des bises !
    Les Lucchitos

    P.s. J’ai reçu mes perles en is de yaks 😁😁😁😁😁

    • Ca nous a fait très bizarre de reprendre la route comme si notre passage chez vous et en Alsace n’était qu’un beau rêve un peu lointain. Mais on était très excités d’arriver en Chine aussi, de découvrir une nouvelle culture, de nouvelles recettes, de nouveaux visages… et on n’est pas déçus ! Les 50h de bus (3 bus en tout) sont passées assez vite, surtout qu’ils sont organisés en petites couchettes (photo sur FB).
      Des bisous !!!

      PS: je pense à toi Alice devant chaque stand de bijoux ici (et encore plus dans le quartier tibétain!!!)

  • Dis donc, la planète est trop petite pour vous !!!!
    A cette allure vous aurez fini le tour plus tôt que prévu !!!….. Trop puissant les jeunes larrons !!!!
    …. Evidemment si vos corps se sont replongés dans le Gewurztraminer, le moral est remis d’aplomb !

    On vous félicite encore pour ce magnifique périple !
    Bizz de nous deux, et ….. COURAGE !
    Laura et Eddy

    • Il nous reste encore beaucoup de choses à voir !!! Et puis on ne fera pas 100km tous les jours ! On est plutôt à 0km en ce moment 😉
      En tout cas c’est vraiment cool de savoir que vous nous suivez toujours !

      On vous embrasse

  • Je suis pleine d’admiration pour ces jeunes temeraires qui savent aller jusqu’au bout de leur reve sans jamais laisser transpercer le moindre signe de decouragement . BRAVO

    • Oui MAIS … parfois il est dur de partir après certaines rencontres … comme à Paidochori fin février …. On repense à ton coin de paradis comme un endroit où on aurait volontiers mis entre parenthèse notre tour du monde, et on comprend pourquoi tu es tombée amoureuse de la Crète ! MERCI

  • Et bien dites donc beaucoup de copier : coller dans votre reportage , dans l’Est aussi il fait froid! mais novembre nous surprend . Et bien dites donc vous êtes donc loin de savoir ce qui est dans vos assiettes ! Et la chaine du froid , elle est respectée !!!!!! Enfin heureusement qu’il y’a des restes de Gewurtztraminer.

    50 h de bus ! en combien de jours ? vous allez vous reposer alors !
    Bon périple à vous et à bientôt

    • Les jours se sont suivis et se sont ressemblés à peu de choses près, mais cela nous a permis de rentrer progressivement en Chine, en découvrant d’abord sa partie Ouïgour. On ne sait pas toujours ce qui se passe en cuisine mais en tout cas on adore découvrir la cuisine de ce pays ! 50h de bus en 3 jours, et nous sommes à Chengdu depuis déjà 5 jours. Par contre on ne sait pas très bien quand on repart … !

  • Debout les campeurs et haut les cœurs, n’oubliez pas vos bottes parce que ça caille aujourd’hui !
    Terrible nouvelle amis campeurs ! La marmotte s’est fait la malle de son festival et est partie pour se refaire une santé…..y paraît qu’elle emballe du chocolat avec du papier d’allu…..pffff.
    Vos photos du marché nocturne nous (heu, à Fabian surtout) ont donné envie de revoir (pour la 30’000 ème fois) Blade Runner, bon là les marchés nocturnes sont sous la pluie….ce que nous ne vous souhaitons pas. Mais après la marmotte et sa météo, on s’est dit: allez, on se fait un bon dans le futur (Alice aurait préféré la famille Mc Fly, la DeLorean et Doc, of course… ) !

    C’était notre clin d’oeil cinéma. N’oubliez pas qu’on est copain avec DHL, des fois qu’il vous faille du miel ou autre chose. Eric, n’hésite pas, on sait comment se procurer des Snick……(SoA).

    Des bises (et on vous laisse un peu tranquille, promis)
    Les Lucchitos

    • Si tu lis l’article sur l’Albanie tu verras plusieurs références à “Retour vers le Futur”. Si vous trouvez toutes les répliques qu’on a incrustées dans l’article vous avez le droit à un cadeau surprise ( made in China?) . On se rapproche quand même de Blade Runner à Chengdu, ville de 15 millions d’habitants, avec ses “petits immeubles” à 28 étages. Les petits hein, il y en a des plus grands, et pas très espacés hein ! Des fous ces architectes chinois ! On a réussi à trouver des snickers chinois , mais pas facile ici de trouver du “vrai” miel ….. Où sont les abeilles ???!
      Il est strictement interdit de nous laisser tranquille ! Par contre Alice il faut arrêter la drogue avant de nous laisser des commentaires hein ?!!!

      Des bisouuuuuus

  • On vous lit, on vous envie, on vous suit toujours avec beaucoup de plaisir et d’intérêts.
    Vite le prochain chapître de ce beau livre !
    Plein de courage quand vous en aurez besoin et plein de gros bizzoos
    Les 2 Smedt

    • Il faudra attendre un peu pour le prochain article on fait un peu de sur-place à Chengdu. Mais on ne s’ennuie pas pour autant ! Avec nos amis on en profite pour découvrir, entre autres, quelques spécialités architecturales et culinaires (on oublie à chaque fois de prendre des photos avant de se jeter sur le repas!) et la réserve de pandas 🙂
      Pas besoin de courage pour l’instant donc, mais surement quand il faudra repartir vers de nouveaux horizons, plus exotiques encore ?

      des bisous !

  • Un petit coucou et une grosse pensée pour cet anniversaire…déjà plus d’un an que vous êtes en route ! C’est fou ! Bravo ! Merci pour vos articles, les photos…..tout cela semble tellement surréaliste en effet pour nous….bien casaniers dans notre jolie petite Alsace :-). Ici l’automne est très doux, on a même déjeuné sur la terrasse. – sinon le programme n’a rien de bien original ( période d’intense boulot ponctuée de qqs sorties dans la nature -)))). Pleins de gros schmoutz.

    alexe et david.

    • Merci ! Et oui ça passe bien vite !
      Après le Taklamakan on retrouve nous aussi un peu de douceur (mais d’humidité) à Chengdu. Enfin douceur oui mais pas pour le palais ! Ici on découvre les épices et les saveurs du Sichuan ! Et ça pique !

      Des bisous !

      ps : alors ? le concombre ?

  • Salut les Aventuriers
    Vous voilà repartis sur les routes du monde. C’est toujours un grand plaisir de vous lire et de voir toutes ces photos!!!!!!!!!!!!
    Profitez pleinement de votre séjour en Chine, prenez des forces la suite.
    Gros bisous à vous deux

  • Bonjour, nous venons de découvrir votre blog par des connaissances professionnelles et sommes époustouflés par ce que vous êtes en train de vivre; nous revenons d’un périple de 7 mois à vélo autour de l’Europe et vos récits nous touchent ….d’autant qu’actuellement, mon livre de chevet est “La longue marche “, récit écrit par Bernard Ollivier qui retrace son aventure, à pied, sur la route de la Soie ( Istanbul à Xi’an) Nos jambes fourmillent …..
    Merci de nous partager ces moments d’exception! Bonne route à vous!!
    Sylvie et Jean-Louis

    • Longue Marche … Le récit de Bernard Olliver nous a inspiré pendant les préparatifs et le 3eme volet a accompagné nos premiers coups de pédale. Je pensais le relire maintenant que nos traces ont croisés les siennes , pour mettre les images qui correspondent sur ses mots …

      Merci pour votre message !

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